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Elections 2011 en RDC: rôle prophétique de l'Eglise catholique (2/2)

24 Avril 2012 , Rédigé par Abbé José MPUNDU Publié dans #Carte blanche à

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    Abbé José Mpundu1

 

Volonté délibérée de tricher

 

Cette volonté de tricher ou de manipuler le processus électoral en faveur d'un candidat a commencé avec la révision cavalière de la constitution en réduisant le nombre de tour du scrutin à un seul tour. Cette révision constitutionnelle, qui n'a pas fait l'objet d'un référendum populaire, a été réalisée dans un climat de corruption avérée.

 

La révision du fichier électoral a été aussi réalisée dans le même climat de laisser aller. On a parlé de doublons, d'omissions et de remise des cartes d'électeurs à des enfants, à des policiers et militaires ainsi qu'à des étrangers. La résistance opposée par la CENI à la demande d'un audit du fichier électoral s'inscrit dans cette même volonté de tricher.

 

Dans le déroulement du scrutin, la présence des bulletins de vote déjà cochés en faveur d'un candidat est une des preuves de cette volonté de tricher. On ne peut pas parler ici d'une simple irrégularité. Comment ces bulletins se sont-ils retrouvés entre les mains de ces particuliers ? Qui les leur a donnés ?

L'exclusion ou la mise à l'écart de certains témoins des bureaux de vote ainsi que l'enlèvement de certaines urnes par des éléments armés pour des destinations inconnues sont aussi des preuves de fraude électorale.

 

Elections dans un climat de violence organisée

 

Déjà dans la période préélectorale, avant même la campagne électorale, nous avons observé des scènes de violence de la part de deux camps: la majorité et l'opposition. Nous noterons par exemple la destruction voire l'incendie des sièges des partis ou des chaînes de télévision... des morts d'homme. Pendant la campagne et surtout le dernier jour de celle-ci, à Kinshasa, nous avons assisté à des scènes de grande violence. Le jour même de la tenue du scrutin, on a enregistré des morts dans les différents coins de la Capitale et du reste du pays. Et ce, tant de la part de la population que des éléments armés sous contrôle du pouvoir finissant.

 

Tous ces éléments que nous venons d'évoquer montrent clairement que nous n'avons pas eu de vraies élections. Comme en 2006, nous nous sommes retrouvés dans une mascarade d'élections ayant pour seul objectif de donner une légitimité interne à celui qui a déjà été choisi par les "faiseurs de rois" dans notre pays du Tiers monde et particulièrement en Afrique.

 

D'où la manipulation non seulement des résultats mais aussi de l'opinion nationale et internationale pour l'acceptation du "verdict" des urnes. Un verdict que nous savons à l'avance truqué et trafiqué en faveur d'un candidat. Avec comme conséquence le risque, comme en Côte d'Ivoire, d'une guerre civile.

 

Que devrait être le rôle de l'Eglise dans cette situation ?

 

L'Eglise qui a participé activement à ce processus en s'investissant d'abord dans un grand travail d'éducation civique et électoral, et ensuite dans l'observation des opérations du scrutin en déployant 30.000 observateurs à travers tout le territoire national, a le devoir de veiller à la proclamation de vrais résultats des élections.

 

Au regard de ce qui se prépare, nous pouvons dire qu'il n'y a que la hiérarchie de l'Eglise catholique qui peut éviter au pays un second hold-up électoral et un coup d'Etat organisé qui pourrait déboucher sur un bain de sang. Aussi croyons-nous que notre Eglise pourrait s'inspirer de ce qui s'est passé aux Philippines, à l'époque du président Ferdinand Marcos.

 

En effet, après avoir triché aux élections, le président Marcos s'est proclamé vainqueur aux élections qui l'opposait à Madame Cori Aquino. C'est le Cardinal Sin, d'heureuse mémoire, qui a pris son courage prophétique à deux mains pour proclamer, à partir de la Radio Veritas, les vrais résultats des élections. A la suite de cette proclamation, les Américains ont envoyé un hélicoptère pour prendre Marcos et l'ont amené aux USA où ils lui ont accordé l'exil.

 

Les évêques de la CENCO (Conférence Nationale Episcopale du Congo) auront-ils ce même courage prophétique qui a animé le Cardinal Sin ? C'est le souhait et l'attente de tout le peuple Congolais.

 

barrerdc

1. Prêtre de l'archidiocèse de Kinshasa. Cet article nous est parvenu le 3 décembre dernier, alors que la nécessité de faire une plateforme comme celle-ci commençait à se faire jour. Nous avons pris le parti de le publier in extenso étant donné qu'il n'a rien perdu de sa fraîcheur. Notons que les rapports des institutions internationales parues bien après et dont les compatriotes se gargarisent abondent en son sens.

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